Le chant de la rivière

Texte de Barry Lopez

spectacle d'une heure

 

 
 

Gaël Mevel    : violoncelle et voix

en solo ou avec

Daniel Lifermann : flûte Shakuhachi

   
 

 

 

Barry Lopez est un très grand poète américain.
Son livre « le chant de la rivière » est extraordinaire, par le lien si fort qu’il tisse avec la nature, mais avec une nature que seul lui voit et dont il nous ouvre quelques portes.
Ces textes oscillent entre l’imaginaire et la réalité, d’une manière si unique et si étonnante qu’on peut, en suivant ce chemin, s’y perdre parfois délicieusement.

Le travail musical que nous avons imaginé, prend racine dans cette frontière entre l'imaginaire et le réel, entre le son et la matière, entre la mémoire et le vivant.

 

   
 
 

 

 
   
 

extraits de "Le chant de la rivière" de Barry Lopez

Je suis éreinté. Je suis resté debout ici des jours à regarder l'océan déferler sur la plage et, toutes ces heures-là, très progressivement, je me suis laissé glisser jusqu’à me retrouver couché maintenant sur le sable, exténué par l'attente. Il y a eu des moments, tôt le matin le plus souvent, avant le lever du soleil, où je savais exactement pourquoi j’observais l’eau— mais, à cette heure-ci, il n’y a pas de lumière, il est difficile de voir et le moment actuel passe donc sans examen.

Je ne considère pas cela comme cruel. Je ne suis pas découragé non plus. Il y a trop longtemps que je suis ici.

Pendant les heures qui précèdent l’aurore, je regarde le ciel, les petits soleils éloignés, à l’approche de l'hiver, d’Orion et du Grand Chien qui brillent dans le sud, plus haut que l’horizon. Il ne m’est pas difficile d’imaginer, parmi eux, une planète sur laquelle quelqu’un debout, tout seul, dans une clairière, essaie d’apprendre à siffler, sous le regard de gros oiseaux qui ressemblent à des hérons.
(J ’allonge le bras et me mets à creuser le sable, cherchant à tâtons quelque chose de consistant, des pierres dans la terre où m’agripper : je pourrais soudain être délesté de mon poids, chassé au loin comme une plume de la poitrine d’un canard par la brise légère qui cherche maintenant sa voie dans mes cheveux.)

Je me relève. Je recommence à guetter. Je sais ce que je cherche. J ’attends.